Dans le tourbillon de la modernité, une phrase semblait résonner dans tous les coins du monde : « Je n’ai rien à cacher. » Elle était prononcée avec désinvolture, souvent avec un sourire confiant, comme si le simple fait de vivre une vie ordinaire rendait quelqu’un invulnérable aux dangers de la surveillance. Mais derrière cette assurance, se cachait la naissance d’une époque sombre pour l’humanité.
Pendant des années, les technologies de surveillance avaient progressé à pas de géant. Caméras toujours plus discrètes, logiciels de reconnaissance faciale, écoute des communications, tout était mis en place pour suivre, analyser, prédire chaque mouvement, chaque pensée. Les gouvernements et entreprises assuraient que c’était pour la sécurité, pour le bien-être, pour prévenir avant de guérir. Et la majorité, bercée par cette illusion de sécurité, acquiesçait sans réfléchir.
L’indifférence collective face à ces intrusions était le terreau idéal pour l’émergence d’un projet colossal : L’Œil Omniscient. Ce réseau interconnecté regroupait chaque source de données existante, créant une toile de surveillance totale, capable de prédire, avec une précision terrifiante, les actions, pensées et émotions de chaque individu.
Au début, les bienfaits semblèrent évidents. La criminalité baissa, les accidents étaient anticipés, les conflits résolus avant même qu’ils ne commencent. Mais lentement, insidieusement, la liberté fut érodée. Les moindres écarts étaient sanctionnés, les pensées déviantes corrigées, les émotions jugées inappropriées supprimées. L’humanité se transforma en une société uniforme, où chaque action était prédéterminée, chaque rêve formaté.
Ceux qui osèrent résister, rappeler l’importance de la vie privée, de la liberté d’expression, furent réduits au silence, effacés de la mémoire collective. Les arts, les passions, l’amour, tout ce qui faisait de l’homme un être unique, fut englouti par cet océan de conformité.
Des décennies plus tard, dans un monde froid, sans couleur, une vieille inscription fut découverte : « Je n’avais rien à cacher, mais j’ai tout perdu. » Une sombre mélodie d’un passé où l’humanité avait sacrifié sa liberté sur l’autel de la sécurité, ne réalisant que trop tard le coût véritable de son insouciance.